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Photos en errance
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13 novembre 2020

Tranche de vie du pouillot véloce

Cette fois-ci, pour changer un peu, plutôt que de vous proposer des images, je vous présente ci-dessous un petit texte que j'ai eu le loisir de rédiger pour une petite revue ("les carnets du Bon-Obs" dont s'occupe Daniel VDS) publiée à usage interne dans le groupe d'amis ornitho dont je fais partie.

Mais rassurez-vous: je n'ai aucune prétention littéraire et je reviendrai bien vite à la photographie !

 

Bonjour les ornithos !

Je me présente : je m’appelle Pouillot, véloce de mon prénom. Certains petits comiques me surnomment « chiff-chaff », et cela sans m’avoir demandé mon avis, mais bon ! Passons sur cette familiarité… Des « généalogistes » m’ont même trouvé une famille : les Phyloscopidés. Il paraît que mon nom complet est « Phyloscopus colibita »...colibita ! Je vous demande un peu où ils ont été dénicher ce prénom là !

D’après ces grands savants, j’ai plein de cousins, ici, et même à l’étranger ! Il m’arrive d’en croiser certains mais nous ne sommes pas très intimes : fitis et siffleur m’indiffèrent ; il faut dire que je ne comprends pas ce qu’ils racontent, nous n’avons pas fréquentés la même école de chant ! Et ce frimeur de « grand sourcil », un prétentieux qui fait courir tout le monde, je ne le croise que rarement chez nous.

Je vais vous raconter un peu ma vie, mon quotidien :

Au tout début du printemps, je m’établis dans ma zone de prédilection, qui est très vaste : vous pouvez me rencontrer à peu près partout en Europe, mais je reviens souvent dans le coin qui m’a déjà accueilli l’année passée… je suis fidèle à mon petit coin de paradis ! Ce que je préfère, ce sont les bosquets, les bois et les forêts ; mais attention, pas trop touffus : j’ai besoin de lumière. Les vieilles forêts sombres pleines de lichens qui pendouillent, non merci ; ça me fout le cafard !

Mais à peine arrivé, pas le temps de se reposer du voyage ; au boulot tout de suite !

Et quel est votre travail allez vous me demander ? C’est simple : je chante, je chante encore, je chante encore et encore, du lever du jour au coucher du soleil ! Quel beau travail, facile et agréable, pensez vous… Je voudrais vous y voir : c’est épuisant ! De plus ce sont toujours les mêmes notes, une partition des plus rudimentaires… mêmes les promeneurs qui étaient contents de m’entendre au début du printemps me trouvent vite lassant…

Pour me reposer, je n’aurais qu’a arrêter de chanter et faire silence... Mais ça ne se passe pas comme ça ! Car si je chante à tue-tête c’est pour m’approprier mon petit coin de forêt et pour en éloigner les envieux qui souhaiteraient s’installer chez moi ! Même si mon « home sweet home » fait à peine 20 mètres de diamètre, il fait des envieux. Et pas question de passer chez le notaire pour rédiger un acte de propriété. Mon seul titre de propriété, c’est mon chant !

De plus, comme la nature est bien faite, ce chant, que vous trouvez monotone, a l’heur de plaire à la gent féminine… d’ici à ce qu’une petite demoiselle bien mignonne succombe à mon charme, je n’aurai pas trop longtemps à attendre…

Vous allez donc fonder une famille, allez vous me dire ? Vous aller devoir construire un nid et vous occuper des enfants… Eh, Ho ! Faut pas me prendre pour un pigeon non plus ! Je ne vous l’avais pas encore dit, mais je suis un gros macho ! MeToo, connais pas ! C’est madame qui va construire le nid, qui couvera les œufs et qui s’occupera des enfants. Encore que, de temps en temps, je veuille bien nourrir un peu les jeunes. Mais pas trop quand même, faut pas abuser de ma bonté…

Ceci dit, ce n’est pas parce que je ne m’occupe pas du ménage que je passe mes journées au café à discuter avec des potes et à boire de la Saint-Feuillien… Pas du tout : je continue à chanter ; il ne faudrait pas qu’un malappris vienne conter fleurette à madame ! Et je sais de quoi je parle, car en bon macho, il m’arrive aussi d’aller tenter ma chance avec la voisine… Si elle est libre, je n’hésite pas à « donner un coup de canif dans le contrat »...la chair est faible, comme disait je ne sais plus qui….

Mais pendant que je chante et que madame s’occupe de la descendance, le temps passe et la saison s’avance. Comme ni moi ni madame ne souhaitons passer la mauvaise saison dans le coin, une fois que les derniers enfants sont capables de se débrouiller seuls et ont quitté le nid, il est temps de se préparer pour le « grand voyage » vers des cieux plus cléments. Pour cela, une seule préoccupation : se gaver le plus possible avant le départ… par ici la bonne sou-soupe aux insectes, aux araignées, aux baies et aux graines : tout fait farine au moulin quand il s’agit de festoyer….

Je pars avant madame ; ben oui, après avoir chanté tant et tant, une fois mon boulot fini, je me taille sans me préoccuper de la mère de mes enfants… macho jusqu’au bout, je vous dis ! Je pars avec des copains et nous volerons de nuit, en plusieurs étapes. De nuit ? Vous croyez que je me complique la vie ? Mais non : quand nous faisons étape la journée, c’est open-bar : toutes les auberges sont ouvertes, et on peut se restaurer sans problème… toutes les haies sont prêtes à nous accueillir pour faire un remake de « la grande bouffe ».

Je suis petit, d’accord, mais je ne suis pas idiot ! Avec les copains, on cause, comme au café du commerce et on réfléchit : on se demande si cela vaudra encore longtemps la peine d’entreprendre un si long déplacement : ce n’est pas vraiment un voyage d’agrément, nous ne voyageons pas sur Brussels Airlines….

Les humains sont en train de nous préparer un réchauffement climatique pas piqué des vers ; ce qui a été fait en plusieurs siècles après la dernière glaciation, ces olibrius sont en train de le faire en quelques années…

D’ailleurs certains d’entre nous tentent le coup et essayent de rester sur place à la mauvaise saison, mais pour le moment, c’est encore un pari risqué….

J’aurais encore beaucoup à vous dire...D’ailleurs certains ornithologues (drôles de gens!) ont passé leur temps à m’observer, à prendre des notes et à écrire plein de choses sur moi, ; comme s’il n’avaient que ça à faire ! Des bonhommes qui s’appellent Géroudet, Verheyen, Zucca et bien d’autres… Y en a même un avec un nom bizarre : Web qu’il s’appelle, mais lui, parfois, il raconte n’importe quoi sur n’importe quoi !

Allez, on se reverra au printemps. Je reviendrai vous agacer les oreilles…

 

Il y a même un zozo qui a tiré mon portrait :

 

Pouillot véloce

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Commentaires
V
C'est génial. On croit connaître une espèce et grâce à toi on en apprend un peu plus. Vivement d'autres articles dans le même style pour parfaire nos connaissances
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